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Notes géographiques, historiques et statistiques sur la commune de Bouée par Mr FRASLIN |
Source "Le Glaneur Savenaisien" 1886 et 1887 |
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Le pays est très découvert, il n'y existe que quelques bouquets d'arbres dans le centre et, dans les prairies, quelques saules rabougris appelé ici les Ziards qui ne vivent guère que quelques années. Leurs racines plongent dans l'eau pendant une grande partie du temps, et ils sont bientôt attaqués au cœur et minés par une humidité trop longue. La végétation de ces arbres est chétive et présente un air désolé. Ce qui rend la nudité des terrains encore plus complète, c'est la rareté et l'éloignement des haies. En effet, les terres cultivées présentent de grandes surfaces découvertes appelées gagneries, séparées les une des autres par des fossés plantés. Il y a peu de petites parcelles entourées de clôtures. Ces gagneries alternativement en repos pendant un an ressemblent, à la couleur du sol près, assez bien à des landes. Elles sont piétinées et tondues par de nombreux moutons jusqu'à leur remise en état. La disposition des servitudes ne permet pas au cultivateur de cultiver, ni d'emblaver quand il le veut. Chaque propriétaire est obligé de compter avec son voisin. Mais en examinant les parties cultivées, l'aspect change. Ces terres, naguères si nues, sont couvertes d'un blé élevé qui dédommagera amplement l'agriculteur de ses efforts. On se trouve au milieu d'une végétation luxuriante et les tiges sont si serrées qu'on se dirait transporté au milieu d'une forêt épaisse de céréales. Bouée tirerait-il son nom de la nature même de ses prairies et de ses terres? Ou bien dans l'opinion moins probable, son clocher servait-il de direction aux marins? Toujours est-il que sa première chapelle devenue église paroissiale fut et est restée dédiée à Notre-Dame, patronne des gens de mer. La première hypothèse est la plus admissible. Ce nom a beaucoup de ressemblance avec le mot "bog" dont le sens est marais. Si l'on considère les traces d'une voie romaine qui partait de Rohard pour se rendre à Blain et même dans le bas de la Loire, on peut concevoir que ce village était un point important, importance relative, mais maintenant bien déchue, qu'il a longtemps conservée. On voit encore en un endroit appelé Rochette, sur l'étier du Syl, les traces d'un chemin.(1) Non loin de là, dans les prairies du Tertre, près d'un rocher, un couvent, un moutier* qui paraît avoir eu son moment de gloire, fut construit à une époque bien reculée. En effet, les ruines existaient longtemps avant la révolution. Une rumeur bien vague en attribuerait la destruction aux pirates normands. Ce qui est certain, c'est que des moines l'habitaient (un endroit porte encore aujourd'hui le nom de Pont-aux-Moines) et que, à l'époque de la révolution et antérieurement un bénéfice dit de la Vicomté était grevé d'une rente annuelle de 300 livres au profit des moines de Noirmoutier. Faut-il en conclure que le couvent de Saint-Hilaire ou du Tertre dépendait du monastère de Noirmoutier? Opinion bien croyable et pour laquelle on serait tenté de pencher. Mais là il n'y a aucun document bien précis qui puisse faire affirmer. Dans les ruines se rencontrent des pièces de monnaies anciennes de toutes les époques; celles qui ont été trouvées sont une de Louis XIV en cuivre jaune, plusieurs de Louis XVI et une dont l'inscription presque effacée ne permet pas de préciser la date. Ces pièces ont été jetées là par des femmes, qui faisaient de ce lieu un but de pèlerinage dans la conviction d'obtenir la maternité. Peut-être que des fouilles mettront d'autres monnaies à découvert, ce qui permettra de dire à peu près vers quelle époque existait encore ce monument. Le prieuré de Sainte-Anne dont la chapelle existe de nos jours se trouvait à Rohard; son édification eut lieu en 1719; il était vassal des moines de Pornic. En faisant des douves, dans des prairies voisines de la Vallée du Pas, des cultivateurs ont mis a découvert de nombreuses tuiles, peut-être d'origine romaine. Cette localité, bien que des documents déposés à la mairie ne remontent pas au-delà de 1564 semble avoir été constituée en commune (feuillette, trève), bien avant cette époque.
(1) La plupart des gens de ce pays ont vu ce chemin pavé qui a été remplacé, sur une partie de sa longueur, par le chemin de petite communication n°5. Maintenant aucun débris ne permet d'en préciser la véritable situation. A l'époque de la maturité de l'herbe, les habitants se trouvent fort étonnés que le foin soit plus vite mûr, en certains endroits des prairies du Tertre et du Pont-aux-Moines.Ils concluent que dans le sous-sol se trouvent des cailloux. Leurs assertions paraissent fondées, puisque dans la même direction, près du Syl, se remarquent les indices d'un ancien passage. * moutier: nom ancien de monastère |
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